La dernière mission

***

 

Le soleil venait juste de poindre au-dessus de la jungle quand les hélicoptères étaient venus chercher l’équipe. Maintenant les deux appareils, des hélicoptères UH-1 Huey (ceux de Prédator, Apocalypse Now… ceux du Vietnam quoi !), évoluaient au ras des arbres. A l’intérieur, les hommes qui se battaient quelques instants plus tôt pour leur vie étaient déjà gagnés par la fatigue, et nombreux étaient ceux qui somnolaient, leur tête se balançant au gré des secousses…

Pour ma part, je goûtais le calme de l’instant présent. Le simple fait d’être ici, bien à l’abri dans les hélicos, été d’habitude euphorique pour tout le monde. Mais cette fois-ci, seul le bruit des rotors troublait les animaux de la jungle que nous survolions. Aucune explosion de joie, aucune cannette de bière balançée à la va-vite, aucun tir joyeux et intempestif en l’air. Il est vrai que cette dernière tradition avait dû être abandonnée après le crash de plusieurs appareils, mais la raison principale était ailleurs. Si les deux hélicoptères habituels étaient bien venus, ils étaient maintenant bien vide. Je comptais mes camarades : 5. Puis je penchais ma tête à l’extérieur.

Derrière nous à gauche, le deuxième hélico nous suivait comme une ombre. De ses portes grande ouverte, Aelidnel me fit un petit signe de tête, mais il était manifestement lui aussi à deux doigts de tomber dans les bras de Morphée la Camée (Morphine, Camée… je la referais). A côté de lui je discernais 5 silhouettes.

A nous 12, nous étions donc les derniers survivants de l’équipe Q.I., en cette matinée dramatique. Ce n’était pourtant pas la première fois que nous essuyions de lourde perte : Akira, Slipknot… furent en leur temps très regrettés. En tant que « presque-plus-vieux » (Scandisk restant en effet le doyen incontesté !), j’avais encore de vagues souvenirs de ces célébrités légendaires. Niconono, Mistake, Mme Patat (la seule fille avant Mmmonster ! Oups, après vérification y avait aussi une Miss Hysteria. M’enfin ça peut être n’importe quelle fille, là !) et son irascible de copain (mon modèle !), Korn, Moogle… encore des souvenirs et des textes qui rendirent mes yeux humides. Surtout Slipknot et ses canettes de Despé.

Je jetais un bref coup d’œil sur la vieille glacière qui trônait toujours sous les sièges de l’hélico : de la Kriska, un peu de 1664 et de Kro… autres gens, autres mœurs… J’eu soudain la vision du fameux « débouché de bouteille » de Slip, réalisant le prodige d’arracher la capsule avec ses seules dents… Même si je me sentais incontestablement mélancolique en cette chaude matinée, je restais néammoins fier d’avoir tenu le coup, et d’être resté pour veiller sur l’héritage de nos aînés en Connerie. En effet, malgré toutes ces pertes l’équipe avait toujours réussi à survivre à ses blessures, et à continuer à aller de l’avant. De nouvelles recrues avaient remplacés tant bien que mal les légendes, et la plupart avaient finis par prouver leurs utilités dans leur domaine respectifs.

Evidemment, l’équipe eut son lot de dilettantes : des gars qu’on croisait comme ça, une fois ou deux pour ne plus jamais les revoir… Qui se souvient de Lucifer 666, Docteur Click, Discow, Cyberdeeder, A-Lex, REK, Keyser Soze ou encore Meroje ? D’illustres inconnus qui, le temps d’un ou plusieurs numéro, partagèrent notre combat et nos idéaux. Fauchés en plein ascension par de vicieux et non moins inconnus ennemis. Tiens, je viens même de me rappeler que j’avais incité un copain à écrire : Gamin009. Il avait pondu un (seul et unique) délire sur… la vie en général, je crois. Même moi j’avais pas compris !

Et puis il y eut les autres, me dis-je quand la tête de Marakorn vint se poser sur mon épaule. Le temps de décalquer la tête de l’impudent Breton sur la cloison du fond et je replongeais dans mes pensées. Mageta, Kiwi32, DJPeuc… C’était la relève. Je lancais l’escadron Golmon quand Kharsneg venait ajouter sa méchanceté à une équipe déjà fourbe et cruelle ! Blèh démarrait très fort avec 11 textes d’un coup (personne ne lu les 11 entièrement, mais c’était la fougue de la jeunesse !). On aurait presque pû dire que c’était l’âge d’or de Q.I. : des textes par paquets de dix, des sujets aussi divers et intéressants que :

Pourquoi faut-il exterminer les profs ?

Pourquoi les blondes sont-elles si connes ?

Pourquoi les vacances ?

Des sujets pouvant être qualifiés de triviaux évidemment, mais toujours propices à une bonne tranche de rire et déconnade. Sisisi.

Puis les mois passèrent, Q.I. adoptant presque un rythme de croisière. Ash commençait sa série d’Interview que le monde entier lui envie (surtout que j’étais le premier à être interrogationné !! J’en ai encore le trac...) ; Dark Wind faisait germer dans un coin de son cerveau malade (mais non, c’est pas péjoratif !) l’excellente idée d’un grand récit avec et par tous les auteurs ; Sir Ersatz (un lien de parenté avec Yakko ?) étudiait la linguistique des Schtroumpfs, entre autres choses… et Black Bart se faisait déjà les dents au détriment de la gente féminine !

Quand l’hélicoptère amorça un large tournant, je m’aperçut que nous étions presque arrivés. En effet, c’était le signe que nous venions de franchir la frontière. Plus qu’à longer celle-ci pour enfin arriver à notre camp et prendre un repos bien mérité. Déjà les autres commençait à se réveiller. KikoO essayait vainement de balancer quelques cailloux sur la Aelidnel et sa queue de tapette dans l’autre appareil, tandis que Marakorn se décollait du mur à l’aide de sa fidèle hache. Scandisk se rendant compte qu’il ronflait comme un sonneur depuis le départ faisait semblant d’essayer de chasser un gros rhume. Mmonster s’assurait avec son miroir que son maquillage était toujours en parfaite adéquation avec son treillis kaki, tandis que Ash continuait à pioncer sur ses genoux, la pelotant sans vergogne au passage.

Dans l’autre appareil, Titus Maximus engageait une belote avec DvS Sh00t, Fox Furby et Aelidnel, tandis que Black Bart faisait déséspèrement tous les sacs pour trouver de quoi manger. Grogkiller… semblait chasser les mouches à l’aide de sa M-60, à moins que ce ne soit pour faire tomber des noix de cocos. En effet, se déclarant « ami de la nature » il se fait depuis quelque temps un devoir de nourrir les babouins de la jungle…

Mais malgré de telles attitudes, je sentais bien que la lourdeur de l’atmosphère n’était pas seulement dû aux flatulences de Scandisk… Tout le monde le savait bien : cette mission avait été la dernière. Nous avions délogé une poche de résistance, une tribu de profs encore imperméable à l’humour, mais ceci au prix de terribles pertes. Malgré un enthousiasme certain, Ti-po-70 avait succombé à ses blessures. Blèh avait eu une subite révélation, et s’était enfoncé dans la jungle à la recherche de son « moi » profond. Le Dr. Ryohji avait également disparu, à la recherche de ses fameux carnets, et Upsilon était tombé presque dès la prise de contact avec l’ennemi, victime sans doute d’une mauvaise note fatale… Nous n’étions plus que 11, et nous savions tous que Scandisk et Marakorn avaient prévus de se retirer. Kharsneg semblait toujours aussi méchant, mais des problèmes de connexion neuronales l’empêchait de nous rejoindre autant qu’il le voulait. Peut-être étions-nous trop peu pour continuer, et d’un style peut-être trop différent avec ce qu’avait été Q.I. à l’origine. Ou peut-être pas.  Les photos en noir et blanc de nos illustres précurseurs affichées sur les murs ne pourront jamais y répondre.

Enfin, nous arrivâmes. Après un court cercle au-dessus de la base, les hélicos se posèrent. Quand enfin nos pieds touchâmes à nouveau terre,  j’avais l’esprit plus apaisés. Oui, une page était sans doute tournée, une page qui verrait la fin de notre belle équipe de Q.I.. Mais le rappel de tout ce que nous avions faits ensemble, de toute cette Connerie joyeusement partagée me ragaillardi. Je n’avais aucun regret à ressentir, juste la satisfaction de ne pas être passé à côté de cette aventure, et de l’avoir vécu du mieux possible.

Alors que nous déchargions une dernière fois le matériel (un assortiment hétéroclite de Bazooka, mitraillettes automatiques, New-Look, tapette à mouches et lance-pierres…), je vis du coin de l’œil une ombre approcher. C’était notre Yakko national, le seul à avoir osé ce webcamer la face devant le monde entier avec un slip sur la tête. Il engagea une grande conversation avec Aelidnel, et les sourires échangés me dirent que peut-être tout n’était pas encore fini. Du moins pour ces deux-là. Marakorn vint se joindre à eux, comme Fox Furby. Je commençais à m’interroger si leur tactique n’était pas seulement d’échapper à la corvée de rangement, mais je m’aperçu que tout était déjà remis à sa place. Quand il repartirent tous ensemble vers un des bâtiments, sortant stylos et papiers de leur poche, je sût qu’une nouvelle aventure venait de commencer…

 

 

Avant de rejoindre à mon tour mes quartiers, une nouvelle pensée se fit jour dans mon crâne (pas aussi garni que je le voudrais) :  je me rendis compte que toute peur du futur avait disparu. Toute peur sauf une. Cette interrogation angoissante qui me tarrodais inconsciemment depuis 2 mois, presque aussi douloureuse que de savoir Bush président des States : la peur de ne jamais savoir pourquoi diable Scandisk était-il suspendu à ce bout de rocher dans the Greatest Story of tous les temps 6 en avril !!

Et puis une illumination assailli mon esprit : je n’avais qu’à me jeter sur le 6e épisode de cette grande série pour découvrir enfin la vérité vraie qui est ailleurs !!! A bon entendeur…

 

Note personnelle : merci à tous les auteurs, et même les lecteurs (je suis bon…) parce qu’on s’est quand même bien marré !

 

Sigma08